La première fois que j’ai essayé de faire du porridge, c’a été un désastre, je l’admets. Après l’avoir goûté, je me suis dit : “Non, le porridge n’est pas pour moi”. J’ai alors réalisé que j’avais fait des erreurs tant dans le choix des ingrédients que dans la préparation. Maintenant que je sais comment le préparer, j’en raffole et j’en mange au moins deux fois par semaine. Je suis donc ici pour vous parler de ce plat et si vous ne l’avez jamais essayé, je suis sûre que vous lui donnerez une chance.

ÉTYMOLOGIE ET HISTOIRE DU PORRIDGE
Tout d’abord, qu’est-ce que le porridge ? Il s’agit d’une soupe faite à partir de céréales cuites dans de l’eau ou du lait. Le terme porridge remonte vraisemblablement au XVIIe siècle et est dérivé de l’anglais pottage
Lorsque l’homme est passé du statut de nomade à celui de sédentaire, les céréales sont devenues un élément fondamental de son alimentation. Il s’agit en particulier des céréales considérées “mineures” telles que l’orge, l’avoine et le seigle. Entre la fin du 18e et le début du 19e siècle, on assiste en Europe et en Amérique du Nord à une évolution progressive de la consommation de céréales. Le blé a commencé à prendre la place d’autres variétés et l’utilisation de farines blanches s’est généralisée, au détriment des farines complètes. Néanmoins, le blé ne remplace jamais complètement les autres céréales. Pourquoi ? Le prix. Ceux qui souffraient le plus des fluctuations du prix du blé étaient les classes ouvrières et lorsque le prix augmentait, il devenait un aliment exclusivement réservé aux riches. C’est pourquoi les autres céréales sont considérées comme “pauvres”.
Plat humble mais nutritif, le porridge était servi au petit-déjeuner aux soldats pendant la Seconde Guerre mondiale.
On dit qu’on pouvait distinguer un soldat anglais d’un soldat écossais par le type de porridge qu’il mangeait : la version salée était typique de l’Écosse, tandis que la version sucrée était plus courante chez les Anglais.
AVOINE, “CÉRÉALE POUR CHEVAUX”
Dans son Dictionnaire de la langue anglaise (1775), l’auteur Samuel Johnson donne la définition suivante de l’avoine : “Une céréale qui, en Angleterre, est donnée aux chevaux, en Écosse, donne la subsistance aux hommes”.

PORRIDGE, LA RECETTE TRADITIONNELLE
La recette traditionnelle est celle du porridge écossais et comprend quelques ingrédients simples : de l’avoine concassée (pinhead oats), de l’eau, du sel. Il s’agit donc traditionnellement d’un plat salé. Cependant, comme vous le découvrirez plus loin dans l’article, la version sucrée est celle qui a connu le plus de succès et qui est aujourd’hui la plus populaire.
Versez l’eau et l’avoine dans une casserole à fond épais. Une fois l’ébullition atteinte, poursuivez la cuisson à feu doux pendant 20 à 30 minutes, en remuant avec une cuillère en bois ou la traditionnelle Spurtle1. Une pincée de sel en fin de cuisson et le porridge est prêt à être servi. L’ajout d’une pincée de sel fera ressortir l’arrière-goût de noix caractéristique de l’avoine. Il n’est pas recommandé de saler au début ou pendant la cuisson car les grains deviendront plus durs.
Il y a qui utilise une part d’eau et une part de lait, bien que cette légère variation ne soit pas considérée par tous comme respectueuse de la recette originale. Certaines personnes font tremper l’avoine la veille, mais ce n’est pas indispensable.
Selon la légende, remuer le porridge dans le sens des aiguilles d’une montre et avec la main droite est un bon présage. En revanche, on dit que remuer le porridge dans le sens inverse des aiguilles d’une montre et avec la main gauche porte malheur ; les plus superstitieux prétendent que cela évoque le diable lui-même. Traditionnellement, il doit être servi dans des bols en bois et dégusté debout, en trempant chaque cuillerée de porridge chaud dans un bol rempli de lait froid.
À CHACUN SON PORRIDGE
Aujourd’hui, la version la plus populaire est la version sucrée et il existe de nombreuses différences par rapport à la recette traditionnelle écossaise. Les grains d’avoine cassés sont peu connus en dehors des pays anglo-saxons et sont remplacés par de gros ou petits flocons d’avoine.
Les gros flocons d’avoine sont fabriqués à partir du grain entier, qui est étuvé et écrasé par deux rouleaux. Quant aux petits flocons d’avoine, eux sont fabriqués à partir du grain cassé. Les grains cassés prennent plus de temps à cuire que les gros flocons, qui sont prêts en 10 minutes. Les petits flocons donnent une texture finale plus crémeuse et ont un temps de cuisson encore plus court – ils sont appelés quick oats. Ils sont idéaux si vous recherchez un petit-déjeuner sain et rapide à préparer. Au lieu de l’avoine classique, vous pouvez également utiliser des flocons de sarrasin, de l’orge, de l’épeautre ou un mélange de plusieurs céréales. On commence également à trouver plus facilement des flocons de quinoa.


Une autre variation de la recette originale concerne l’utilisation de boissons végétales à la place de l’eau et du lait. En plus de rendre votre porridge très savoureux, ils sont de bons substituts du lait pour les personnes intolérantes ou ayant choisi un régime sans produits laitiers.
Mais ce qui rend ce petit-déjeuner unique et spécial, c’est que vous pouvez le personnaliser avec ce que vous voulez. Fruits secs, fruits frais, fruits déshydratés, grains oléagineux2, poudre de cacao ou brisures de fèves… il y en a pour tous les goûts !
BOISSONS VÉGÉTALES
Improprement appelée “lait végétal” en remplacement du lait, la boisson végétale est une boisson obtenue par la transformation de céréales, de fruits secs ou d’oléagineux. Il est composé d’environ 80% d’eau et des 20% restants de la céréale/graine qui le caractérise, avec l’ajout de quelques autres ingrédients – les meilleurs ne contiennent que de l’huile végétale et du sel. Les plus connues sont les boissons au soja, au riz et aux amandes, mais il existe aussi des variantes plus gourmandes comme le riz et la noisette ou le soja et le cacao.
RETOUR AUX ORIGINES
De nos jours, le porridge d’avoine est servi dans de nombreuses chaînes des grandes villes et on le trouve de plus en plus dans les hôtels qui proposent un petit-déjeuner à la carte. Il y a encore 10-15 ans, il était toutefois beaucoup plus difficile de trouver des endroits qui servaient ce type de petit-déjeuner, car il était considéré comme un plat purement artisanal. Aujourd’hui, même dans la City – le quartier financier historique de Londres – le porridge est très populaire auprès des hommes d’affaires, qui sont de plus en plus attentifs à la nutrition et au bien-être physique.
D’un plat de pauvre consommé par les classes ouvrières, il est devenu un petit-déjeuner sain recommandé par les nutritionnistes et de nombreux influenceurs de fitness : qu’est-ce qui a changé ? Le succès actuel du porridge peut être attribué à la redécouverte plus générale d’aliments autrefois considérés comme “pauvres”, tels que les céréales complètes et les légumineuses. Un retour aux origines, si l’on peut dire, qui revalorise les aliments peu ou pas transformés et aux excellentes valeurs nutritionnelles.

PETIT-DÉJENEUR LIGHT
Le porridge continue un petit-déjeuner sain et riche en nutriments, c’est pourquoi il est choisi non seulement par les sportifs, mais aussi par ceux qui suivent un régime végétarien ou végétalien.
L’avoine, en effet, est une céréale à digestion lente, à très faible teneur en gluten, riche en bêta-glucanes et à faible indice glycémique. Il contribue donc à réduire le “mauvais” cholestérol (LDL) et à contrôler la glycémie. En outre, c’est la céréale qui a la plus forte teneur en protéines (13-15%). L’ajout de fruits frais augmentera l’apport en vitamines et minéraux ; l’ajout de fruits secs et d’oléagineux augmentera la teneur en protéines, en graisses insaturées3 et autres micronutriments.
En plus d’être un petit-déjeuner complet à haut pouvoir rassasiant, avec la recette du porridge d’avoine vous pouvez donner libre cours à votre créativité.

- Gros flocons d’avoine (40 gr)
- Boisson végétale au riz et aux amandes (150 ml)
- Banane en tranches
- Amandes (hachées grossièrement à l’aide d’un couteau)
- Poudre de cacao
Versez les flocons et la boisson végétale dans une casserole. Une fois l’ébullition atteinte, baissez le feu et laissez mijoter pendant 8 à 10 minutes ou jusqu’à ce que vous obteniez la consistance souhaitée : certaines personnes la préfèrent plus crémeuse, d’autres plus compacte. Versez ensuite la crème obtenue dans un bol et décorez avec les autres ingrédients. C’est simple, n’est-ce pas ?
Si, par contre, vous êtes déjà un expert dans la préparation du porridge et que vous avez votre propre cheval de bataille… il y a le Championnat du Monde !
WORLD PORRIDGE MAKING CHAMPIONSHIP®
Écosse depuis 1994 se tient le Championnat du Monde de Porridge et la compétition a lieu exactement le 10 octobre, c’est-à-dire le jour de la Journée mondiale du porridge. Le titre de champion du monde est décerné au concurrent qui aura préparé le meilleure porridge selon la recette traditionnelle – avoine, eau et sel – et le trophée a la forme caractéristique de la Spurtle. Pour les plus créatifs, il existe également la catégorie “Speciality Porridge”, dans laquelle tout ingrédient peut être ajouté à l’avoine. Il existe également un concours pour les jeunes âgés de 8 à 16 ans.


1 La spurtle est un outil traditionnel écossais utilisé pour remuer le porridge. Il s’agit d’un bâton en bois d’environ 25 cm de long à la surface lisse, qui empêche les flocons de se coller entre eux et de former des grumeaux. Le sommet peut être décoré de divers motifs, mais le plus courant est le chardon stylisé, symbole national de l’Écosse.
2 Parmi les oléagineux on trouve les graines de lin, citrouille, tournesol, chanvre, sésame, chia.
3 Les graisses insaturées sont ceux que l’on appelle les “bonnes graisses”, comme les oméga-3 et les oméga-6.
© PHOTO CRÉDITS
Je tiens à remercier le photographe James Ross pour la photo du trophée The Golden Spurtle et Hamlyn’s of Scotland pour les photos de l’avoine concassée.
Les photos du flocons d’avoine et du dernier porridge c’est moi qui les a prises, tandis que celles des autres porridges et du paysage écossais sont de stock.
BIBLIOGRAPHIE
- E. J. T. COLLINS, Dietary Change and Cereal Consumption in Britain in the Nineteenth Century

Alberta Zappalorto
Contributor